Un almanach naïf

Almanach de la place Saint-Front

Fête à ne pas manquer

On n’oubliera pas de fêter, le 26 décembre de cette année, la Saint Fulgence, saint patron des voyageurs souterrains du métropolitain.

 

Énigme

Ma demeure n’est guère silencieuse même si je ne hausse jamais la voix. Le créateur a lié nos trajectoires. Je suis plus rapide qu’elle et quelquefois plus fort ; elle est toujours plus constante dans l’effort. Parfois je me repose, tandis qu’elle doit continuer à courir.

Qui sommes nous ?

(Livre d’Exeter)

 

Les grands inventeurs :

Louis Charles Letur ( ?-1854)

On sait peu de choses de ce martyr de la science, sinon qu’il breveta en 1852 un « Appareil à soutenir une personne dans l’air ». À l’occasion d’un vol qu’il tenta en juin 1853, le journal parisien La Presse décrivit ainsi son appareil : « Au mât on a lié un siège de forme bizarre, et dans ce siège est assis M. Letur qui est lui-même solidement amarré par des cordes à toute la mécanique. Sous les pieds de M. Letur, il y a des espèces de pédales dont on verra tout à l’heure l’utilité. Remontons le mât. Au-dessus du siège s’étend un vaste parachute ovale de dix pieds de long sur sept de large. Pour tenir ce parachute en position convenable et pour l’empêcher de céder à l’air, comme fait un parapluie qui se retourne, M. Letur a imaginé une sorte de long réseau de cordes fines qui fixées aux deux extrémités du parachute vient se rattacher au siège. Ce n’est pas tout. Jusque-là, il n’y a pas de procédé de direction. Nous y voici maintenant. Immédiatement au-dessus du siège de M. Letur et au-dessous de la soie du parachute, il y a deux ailes fixées au mât par des charnières mobiles en  tous sens. Ces deux ailes ont deux mètres de long et un mètre de large et ont la forme des ailes du papillon. À l’aide des pédales qui sont établies à la partie inférieure de sa chaise, M. Letur fait mouvoir ces ailes qui, en s’agitant, doivent écarter l’air dans le sens où veut se diriger l’expérimentateur »… La démonstration de 1853 ne fut guère probante, hissé jusqu’à 300 mètres d’altitude par un ballon, « l’appareil à soutenir une personne dans l’air » dégringola vers le sol, sans réussir à se diriger. Si M. Letur survécut à ce vol, un autre, en Angleterre, lui sera fatal l’année suivante.

Édouard Léon Scott de Martinville (1817-1879)

Une dizaine d’année avant le phonographe d’Edison, un français, Édouard Léon Scott de Martinville avait inventé une machine à noter les sons, le phonautographe. Hélas, le phonautographe ne permettait pas de réécouter les sons qu’il reproduisait à l’aide d’une aiguille fixée à une membrane, sur un disque couvert de suie, et l’Académie des sciences qui conserve certains des enregistrements de Scott ne jugea pas bon de financer ses recherches. Ouvrier typographe dans une imprimerie, Scott de Martinville se ruina pour mettre au point cet appareil qui ne lui valut guère de reconnaissance. Par ailleurs, il fut également libraire, rue Vivienne à Paris, et auteur de brochures diverses : on lui doit par exemple un ouvrage sur les prénoms et un autre sur la classification des romans de chevalerie. Né dans une famille d’aristocrates ruinés, il avait baigné dès l’enfance dans l’invention, puisque son père travaillait à mettre au point des ballons dirigeables.

Rébus

pir       vent     venir

1          vient    d’un

(Attribué à Clément Marot)

Le saviez-vous ?

Le A est une tête de vache à l’envers. Il suffit de le tracer la tête en bas pour s’en rendre compte D’ailleurs Alef signifie « bœuf » en hébreux.

Attila le Hun était fiancé à l’impératrice romaine Honoria que sa famille a enfermée dans un couvent pour empêcher le mariage, d’où la mauvaise humeur proverbiale du conquérant.

Les deux fils du chef iroquois Donnacona, originaire de Stadaconé, Taignoagny et Domagaya ont découvert la France le 5 septembre 1536.

Rions un peu

Un des premiers actes de Napoléon III après son accession au pouvoir fut, on le sait, de confisquer les biens de la Maison d’Orléans. On fit à cette époque l’excellent jeu de mots suivant :

« C’est le premier vol de l’aigle. »

(Sigmund Freud)

Comme les gens sont loin

Comme les gens sont loin, et ont-ils même un visage ? L’a-t-on oublié, jamais vu, ou l’a-t-on caché ?
En tout cas, il n’en reste rien d’entier dans la mémoire.
Où étaient-ils ? Où étions-nous ?
Plus proches quelquefois les fleurs, la haie de buis, un vieil objet changé en talisman.
Plus proches certains lieux, un mur couvert d’arbres en espalier, un petit temple rond dans un jardin,
et au sortir des sombres rues,
l’Arsenal aveugle derrière ses grilles,
les scieries sous leurs hangars, et leur poussière dorée entre gare et cimetière,
ou le grand mur de la prison surplombant la rivière, avec ses petites fenêtres sombres à barreaux.
La Broye n’arrêtait pas de couler dans le brouillard,
le dimanche les fusils claquaient répercutés par les falaises verdâtres.
Un couple vieillissait dans l’attente d’une lettre d’Amérique.
Quatre sœurs se fanaient dans la maison trop fermée,
l’une erre en camisole rose dans l’escalier voûté,
l’autre est mise à l’asile où elle peint des bouquets,
l’aînée a les joues rouges à force de rester debout près des fourneaux vêtue de noir,
et Sophie va-t-elle pas se noyer d’un chagrin d’amour ?
Mais le père glousse de rire en secouant son corps obèse.
À l’heure du goûter, on sort de vieux biscuits d’une armoire peinte en rouge à l’intérieur.
Que fais-tu là ? Tu n’es ni gai ni triste, tu t’étonnes peut-être
et manges plus d’images que de pain…

Philippe Jaccottet, « Notes de carnet », L’encre serait d’ombre, nrf Poésie/Gallimard.